Sophie Trautman


SOPHIE TRAUTMAN.


Dans le salon très chic des Trautman, je dois bien le reconnaître, on ne voyait qu'elle.

Une tête et une seule main sur socle de bois lasuré.
La reconstitution ne transpire pas l'authenticité ou le réalisme. Et ne fait en aucun cas partie des cose naturali... les choses naturelles, les natures mortes. On aurait dit un autel païen aux prétentions de luxe non assumées et complètement décalées.
La tête ressemble à une - magnifique, il est vrai - sculpture minérale. Mais elle est fixée à une sorte de... commode sans tiroir. C'est le mot: une vulgaire commode moderne en bois, mobilier aux lignes droites, anguleux, sobre mais austère dans ses traits; même si la lasure a une teinte apaisante, quelque part entre les standards de l'incolore, du pin et du buis. Sous le panneau supérieur, un interstice d'environs dix centimètres laisse apercevoir deux tubes en verre, décorés de ramifications de peinture rose pâle, arabesques assez designs. Ils sont équipés de soufflets en caoutchouc serti d'inox chirurgical, qui montent et descendent lentement à l'intérieur, presque discrets. Quelques tuyaux disparaissent dans le plateau et la base du cou réduit au minimum.
Le bloc n'a pas de porte ou de tiroir, dirait-on: quatre planches d'une même pièce, des roulettes à peine visibles et ce plateau supportant ce que j'étais venu rencontrer.
La tête et la main veuve qui tient un livre sont d'une couleur assez indescriptible, entre l'anthracite bleu et le vert-de-gris pastel, avec quelques brillances de type paillettes de fer.
« Approchez, approchez. J'ai une mobilité visuelle réduite. Venez vous installer face à moi, ça sera plus facile de vous voir. Là je ne distingue que votre ombre. »
Sa voix est douce, humaine, même si on sent que quelque chose est différent. Mais je ne l'ai pas encore assez entendue. Peut-être que ce que je suis en train de contempler fausse mon appréciation.
Je dois admettre que ma curiosité - de journaliste ou de voyeur - et mon admiration sont mêlées d'horreur quasi mystique.
Je lui fais face.
Non, les parents de la jeune femme n'ont pas dû beaucoup réfléchir à l'ergonomie, à la praticité de l'installation.
La tête culmine sur son socle à un mètre maximum. Elle est jolie, finement tracée et quelque part, si vivante.
Vivante, je ne dois pas oublier qu'elle est vivante. Pour autant, est-ce encore un être humain?
La tête me dévisage. Le blanc des yeux n'est plus blanc: grisâtre. Regard neutre mais incontestablement vivace. Ce devait être une superbe fille, avant.


_ Bonjour, monsieur Richard.
Sa voix avait dû faire fondre bien des hommes. Et non, elle n'avait rien d'électronique. Ingénue.
_ Mademoiselle Trautman, bonjour.
_ Vous pouvez m'appeler Sophie. C'est un joli prénom, non?
_ Tout à fait. « Sophia », la sagesse, en grec.
_ Tout le monde le sait.
Elle eut un petit rire musical comme un marimba. Ses inflexions douces mutines semblaient sur la retenue.
_ Vous pouvez prendre une chaise, mettez-vous à l'aise. Enfin, le plus possible. Essayez d'oublier que vous parlez à une sorte d'œuvre art-nouveau-art-déco. Je vous en prie. J'ai vraiment envie de faire la conversation. Mes parents exceptés - et encore, de moins en moins - je parle finalement à peu de gens. Je pensais que la presse s'intéresserait plus à mon cas. Une telle réussite médicale et technologique! Mais non, passés les premiers articles, tout est retombé comme un soufflé. Certes, au début, je n'étais guère causante. On m'a trouvée terrifiante, monstrueuse, et bien souvent le mot « tristesse » a été utilisé. Puis, plus rien ou presque. Jusqu'à ce que vous appeliez et demandiez à me parler directement. Ça m'a touchée. On a eu la délicatesse de poser le téléphone dans ma main, un peu loin de mon oreille mais je vous entendais suffisamment. Et vous, vous m'entendiez? Naturellement.
Incroyable, la teinte de la tête et de la main, de sa tête, de sa main, changeait, se rapprochant de celle, plus chaude, du socle. Sa bouche avait une façon désagréable de bouger quand elle parlait, comme celle d'un automate, alors que le son de sa voix était si humain. Et féminin.
J'avais en effet rapidement parlé avec elle au téléphone pour convenir d'un rendez-vous. J'en avais eu des frissons. Si les sensations provoquées par la vraie rencontre n'avaient rien à voir, elles n'en étaient pas moins violentes. En fait, ça n'avait rien de comparable avec tout ce que j'avais pu vivre et ce que j'aurais pu imaginer.
_ Rien qu'à vous regarder, je peux presque savoir ce que vous pensez. Ma couleur change: plus je parle, plus mon visage aura une apparence proche de celle qui était la mienne, avant. Je veux dire, je ne me mettrai pas à ressembler à une chinoise, comme une partie de mes médecins, ou à une sud-africaine Tswana comme la plupart de mes conceptrices. Je plaisante. Ces femmes ont fait un travail hallucinant, non?
_ Mais pourquoi ce changement de couleur?
_ Ah, mais pourquoi donc cette fantaisie, hein? J'apprécie que vous ne suiviez pas le cours des questions d'usage de votre profession. C'est une idée de ma mère. Elle voulait vraiment m'aider à surmonter l'épreuve en m'encourageant à communiquer. Les premiers mois, je refusais de parler. Du coup, elle a demandé... Elle a demandé cette « option », disons. Plus je parle, plus j'aurai l'air humaine, plus ce qui me tient lieu de peau ressemblera à de la peau, plus ce qui me tient lieu de cheveux ressemblera à mes cheveux. Ils étaient bruns, vous savez? Peut-être vous verrez. Ils étaient un peu plus longs, je crois, mais ils ne pousseront plus. Vous devez savoir que même les cheveux des morts continuent à pousser pendant un certain temps?
_ J'en ai entendu parler, comme tout le monde, oui.
_ Ma couleur de base s'appelle... turquoise de gris métallisé. Joli nom. Les paillettes, c'est aussi une idée de ma mère. Pouvez-vous retirer le livre de ma main? Ça me perturbe.
_ Euh, bien-sûr.
_ Vous êtes gentil.
Elle fit un sourire qui eut l'air presque naturel. Le livre était de Haruki Murakami.
Je me concentrai un instant sur sa main coupée, comme posée là négligemment par quelqu'un d'autre et oubliée. Trousseau de clefs, paquet de cigarettes. Je pensai aussi à une souris sans fil d'ordinateur.
_ Elle ne bouge que très peu, comme mes yeux. Et elle est collée, comme ma tête. Les trois premiers doigts ont une amplitude retreinte qui me permet de faire une pince, mais ils ne s'ouvrent que de quatre centimètres environ. Les livres de poche peu volumineux sont conseillés. Et il me faut quelqu'un pour tourner les pages. Clémentine, ma jeune sœur, était avec moi avant votre arrivée. C'est peut-être la seule à ne pas avoir peur. Je crois que je suis plus un jouet pour elle. C'est normal, elle est encore jeune, je ne lui en veux pas.
Elle eut ce rire qui m'aurait rendu amoureux s'il était sorti de sa vraie bouche. Un autre temps. Une autre vie.
_ Le livre, s'il vous plaît?
_ Oh! Oui, oui, tout de suite...
En le retirant, j'eus un mouvement de recul à la vue de ses doigts qui se desserraient doucement. Elle n'eut pas l'air de s'en apercevoir.
Je pris une chaise et m'assis à un bon mètre d'elle.
_ Votre proxémie s'allonge avec les têtes parlantes?
Je me rapprochai, plus gêné que je ne l'avais jamais été.
_ N'oubliez pas que je suis également une tête pensante, monsieur Richard.
_ Appelez-moi Thierry.
_ Bien, Thierry. Alors, que voulez-vous savoir que vous ne puissiez deviner?
_ J'avais préparé des questions, mais... non, en fait, j'ai eu un mal fou à préparer des questions. Quelque chose en particulier me trouble. Même si, comme vous dites, la presse s'est vite désintéressée de votre cas, j'ai lu les nombreux articles à votre sujet parus l'année dernière. Et les circonstances de votre accident n'ont jamais été abordées, ou alors très succinctement.
_ Oui, ils ont juste dit que j'avais eu la tête tranchée, provoquant ma mort sur le coup.
_ C'est exact, rien de plus.
_ Je ne voulais pas aborder le sujet à l'époque et mes parents encore moins. C'est arrivé sur un chantier. Mes parents dirigent la grande entreprise immobilière Trautman, comme vous le savez. J'étais donc en visite sur cet immense chantier, j'étais venue voir mon père sur le futur complexe des Arbres Des Falaises. Vous en avez entendu parler?
_ Bien-sûr. Ils bâtissent des villes dans les branches en suspension, avec tout un système de cordages et de câbles gigantesque. Le projet le plus fou de ces dernières années, selon moi.
_ JE suis le projet le plus fou, selon moi. Bref, c'est justement un de ces câbles enroulé autour d'une de ces monstrueuses branches-troncs qui a cassé. Trente-six ouvriers sont décédés, mais bien peu en ont parlé. J'ai été complètement fendue en trois morceaux. Il y a une telle tension dans ces câbles... Une de ces coupures s'est effectuée au niveau de ma bouche, exactement aux commissures des lèvres. Vous faites une moue de dégoût mais je vous assure que tout a été tranché très proprement et même, cautérisé par le frottement. Ainsi, ma nouvelle bouche a l'air un peu ratée, d'après ce qu'on m'a dit. Je le sens un peu, aussi. Il y a des limites à la reconstruction plastique.
_ Vous savez donc ce que ça fait de mourir.
_ De nos jours, ce n'est pas si exceptionnel, rappelez-vous le noyé réanimé dans un bocal géant ou le trader baptiste suicidé, numérisé dans le grand ordinateur de la banque centrale missionnaire.
_ Oui, mais tous ont perdu la raison, leurs propos n'étaient guère cohérents...
_ ...ce qui a déclenché un véritable tollé, avec tout un tas d'interprétations scientifiques laïques et religieuses, toutes contradictoires et intéressées, naturellement. C'est vrai que même le Général Daran-Offstern cryogénisé n'a pu nous parler d'autre chose que de visions de guerres qui n'ont jamais eu lieu. De grands grillages qui encerclaient la ville, d'enfants qui se changent en adultes pour traquer et tuer tout le monde. J'ai lu le livre qui retrace son histoire. Enfin, j'y reviens... qu'est-ce que ça m'a fait? On dit que je suis morte sur le coup. C'est presque exact. Cela dit, j'ai dû souffrir le martyr pendant au moins les deux dernières secondes et je vous assure que personne, personne, personne ne voudrait vivre ça. La douleur est telle que le temps n'existe plus, Thierry. Un océan de souffrance vous submerge et vous emmène dans un non-lieu où il n'y a plus que cela qui existe. Votre corps même s'efface pour laisser passer ces vagues de douleur délirante, au-delà des sensations, au-delà du corps, c'est de la souffrance pure et totale. Et oui, le temps se dilate, change...
_ Que voulez-vous dire par le temps n'existe plus ou change?
_ Vous avez déjà fait un rêve qui vous a paru durer des jours, des semaines?
_ Rarement mais ça m'est arrivé, oui.
_ Et pourtant... Les rêves ne durent que quelques secondes, et encore. Ce qu'on appelle communément rêve ne consiste qu'en ce dont on se souvient et ce que nous restituons à nous-mêmes, après avoir vécu ces infimes impulsions d'images et sensations désordonnées, créées par notre cerveau. Dans les rêves, le temps n'existe pas, justement. Ou autrement. Ma mort était comme le plus intense et le plus long rêve de souffrance. Avez-vous déjà rêvé de souffrance?
_ Je fais des cauchemars, comme tout un chacun, mais de là à parler de souffrance...
_ Vous y réfléchirez chez vous, essayez de vous rappeler. Vous avez peut-être vécu un minuscule échantillon de rêve de souffrance.
_ J'y penserai, promis. Vous avez donc terriblement souffert. Et ensuite?
_ Ensuite, la souffrance a continué. Différente, moins intense et moins régulière. Plus compréhensible, je suppose, plus palpable. Mais ma conscience a été altérée par les drogues morphiniques délivrées en quantités astronomiques. Avec ma petite enfance, c'est le passage le plus flou du film de ma vie.
_ Je vous arrête, Sophie. Pardonnez-moi, mais n'y a-t-il rien eu entre votre mort sur le chantier et vos premiers souvenirs d'hôpital?
_ Rien dont je me souvienne. Si je ne me rappelle pas, c'est qu'il ne s'est rien passé, n'est-ce pas, Thierry?
Ses yeux oscillèrent doucement dans leurs orbites, un sourire qu'on aurait dit sarcastique se creusait dans ses joues. Désormais, sa peau avait presque l'air humaine. Ses cheveux ressemblaient à de la paille de fer, mais n'étaient plus seulement dessinés, comme au début de notre entrevue. Ils prenaient du volume, du relief.
_ En tous cas, personne d'autre que vous ne pourrait en parler.
_ Mais pourquoi parler de ma mort alors que je suis en vie? Vous me faites face, vous me regardez reprendre des couleurs, vous entendez ma voix, Thierry, je vous parle de mes souvenirs, je vis. Je suis vivante. Je ne peux bouger, je suis collée à un meuble, mes poumons sont des tubes, mon cœur est caché derrière un panneau de bois, mais il bat, Thierry. Il bat. Il s'était arrêté, il bat à nouveau. Je suis Sophie Trautman et je suis vivante.
_ Excusez-moi. S'il vous plaît. Acceptez mes excuses.
_ Oh mais vous êtes tout pardonné. Je sais quel effet je peux faire.
_ Seulement, je ne comprends pas pourquoi... enfin, pourquoi cette installation? C'est absurde. N'était-ce pas possible de vous donner plus de mobilité, d'indépendance?
_ Et plus de dignité? Pas vraiment, non. Sans assistance, mon cerveau ne peut commander que mes yeux, ma main droite et ma voix, diffusée par un petit haut-parleur haute-fidélité. Il est caché dans ma gorge. Je ne vous le montrerai pas, c'est trop intime et ça serait obscène. Mais croyez-moi sur parole. On dirait presque une vraie voix, n'est-ce pas?
_ Assurément.
J'avais la nausée.
_ Mais il y a une autre raison à tout ça. Papa-maman ont beaucoup pleuré au début, mais ils m'ont reconstituée. Et maintenant je fais partie des meubles. C'est beaucoup plus facile pour eux de le voir de cette manière. L'idée de ma mère (m'encourager à me faire parler) n'a pas été bien vécue dans la famille. Même pour elle... C'était son choix, pourtant. Elle criait de surprise quand je l'appelais et se remettait à pleurer. Je pleurais aussi, mais ça ne marche plus très bien, il n'y a guère que de minuscules gouttes qui perlent au coin de mes yeux. C'est très discret, miniature.
On aurait cru que ses cheveux étaient devenus de véritables cheveux. Et mon cœur se fendit lorsque le phénomène qu'elle venait de décrire se produisit sous mes yeux.
_ ...comme en ce moment.
_ Oui Thierry, vous êtes observateur.
_ Votre voix a changé, aussi. Elle... se brise.
_ Ça s'appelle retenir ses sanglots.
Sa bouche d'automate tremblait du menton, les lèvres tressautaient à peine, petite pantomime d'un désespoir sans fond bien réel.
_ Mais assez de pathos, fit-elle après un soupir. Enfin, si c'est possible dans ma situation... Mes parents ont toujours méprisé mes ambitions artistiques passées, préférant que je cherche un vrai travail, dans l'immobilier. En fait, ils me voulaient dans leur entreprise: avec eux, sous leur surveillance permanente. Je vous épargnerai les détails de ma vie d'avant. Le jour de mon accident, j'étais venu dire à mon père que je cédais, que j'acceptais le poste de chef de dépôt, dans la division des engrais. Ceux qui font pousser ces arbres de titans. Mais ils ignorent tout de la raison de ma présence ce jour-là. Je ne leur ai jamais dit. Si vous écrivez votre article, ils l'apprendront peut-être par voie de presse. Puisqu'ils ne veulent plus m'entendre... Savez-vous que parfois, ils me coupent le son? Si, si, c'est possible. Ils font ça avec des yeux coupables, vous verriez ça! Un jour mon père, ivre, a posé par mégarde une bouteille de whisky devant mon visage. Le son baissé, j'ai dû contempler pendant huit heures un Highland Park 18 ans d'âge. C'était même pas le côté de l'étiquette.
Elle rit encore.
_ Je n'ai pas vraiment besoin qu'on me pose des questions. Je suis bavarde avec vous. Vous me plaisez, Thierry.
J'étais perturbé au-delà de ce que je pouvais analyser. Ma déontologie me susurrait de faire l'autruche devant ses yeux qui me dévoraient, pétillants de ce qui paraissait bien être du désir.
Je ne devais pas m'impliquer. Garder de la distance.
Facile à dire. Son histoire était un enfer.
Elle était de plus en plus belle et je m'attendais à la voir surgir de tout son corps de la boîte, cachée qu'elle était, ne laissant dépasser que sa main droite et sa tête. Tout cela était une immonde farce. Un tour de magie de mauvais goût. Elle n'avait jamais été découpée en morceaux.
Un coup d'œil dans l'espace interstitiel du meuble me ramena à un peu plus de raison. Ce n'était pas une illusion, ce n'était pas un canular. Seulement le résultat d'un terrible accident et d'une expérience monstrueuse et cruelle.
_ Prenez ma main, Thierry. Prenez-la. Elle est chaude, vous verrez, même un peu plus chaude que la vôtre. Un peu moins de quarante degrés, je crois.
_ Sophie, je préfèrerais vous poser encore quelques questions.
_ Et ma bouche, Thierry. Tu sais qu'elle est légèrement humide? Moins que la tienne, à peine plus sèche. Je peux la sentir, tu sais? Je sens des choses. Et mon haut-parleur est caché, loin au fond, tu ne le verras pas. Tu veux me poser des questions? Questionne-moi sur mes besoins, sur ce que ça fait d'être immobile, totalement captive, et de regarder le même pan de mur seule avec ses pensées. J'ai encore tous mes souvenirs: quand j'avais des jambes, des bras, un ventre. Des seins, un sexe. Oh Thierry, j'avais un sexe si joli, avec de petites lèvres fines. Un sexe comme un abricot. Je suis toujours une femme, tu sais? Je suis vivante. Prends ma main. Sens.
Les paillettes de larmes au coin de ses yeux avaient remplacé les paillettes métalliques de sa première couleur.
Alors je saisis sa main doucement, le rouge et le blanc aux joues, des fourmis voraces dans les jambes, le souffle court et rauque, l'estomac dévasté. Pris au piège entre la peur, la pitié et l'horreur et la beauté de ce qu'il restait d'elle.
C'est à dire elle toute entière contenue dans deux petits morceaux de son corps.

Je devais écrire un article.
Je suis retourné la voir plusieurs fois, de nombreuses fois.
Jusqu'à ce que j'arrête.
Je n'ai toujours pas écrit mon article.



el gep 14 juin 2010.